L'ACTU IMMO
Un locataire qui ne paie pas son loyer risque-t-il d’aller en prison ?
La gauche et les associations affirment que la nouvelle loi «anti-squats», examinée ce jeudi par le Sénat, prévoit d’emprisonner les locataires mauvais payeurs.
« Personne n’ira en prison pour ne pas avoir payé son loyer ». Le ministre du Logement avait rendez-vous ce mercredi devant la Fondation abbé Pierre pour défendre la politique du logement du gouvernement. Un exercice d’autant plus compliqué qu’Olivier Klein a été interpellé sur une proposition de loi (PPL) qui fait jaser dans les rangs de la gauche et du côté des associations. Il s’agit de lutter contre l’occupation illégale de logements, qu’il s’agisse de résidences principales ou secondaires, du domicile ou pas.
La crainte des opposants ? Que les locataires mauvais payeurs soient assimilés à des squatteurs. Or, ces derniers risquent, selon la loi, 1 an de prison et 15.000 euros d’amende. Des sanctions que la PPL vise à tripler. La gauche et les associations prétendent donc que ce sera aussi le cas des locataires mauvais payeurs, si la proposition est adoptée. « C’est faux!, rétorque l’entourage Guillaume Kasbarian, député LREM d’Eure-et-Loir et coauteur de la PPL. L’objectif de la PPL n’est pas de sanctionner plus durement un locataire s’il ne paie pas son loyer mais de réduire la durée des procédures d‘expulsion. »
7500 € d’amende et 6 mois de prison
Par contre, la PPL prévoit bel et bien de sanctionner de 6 mois de prison et de 7500 euros d’amende les locataires indélicats. Mais non pas pour non-paiement du loyer mais « en violation d’une décision de justice définitive et exécutoire ayant donné lieu à un commandement de quitter les lieux. » Dit autrement, parce que le locataire n’a pas quitté le logement comme l’a ordonné le juge. Et, à ce titre, Guillaume Kasbarian a souhaité appliquer le même type de sanction pour les locataires mauvais payeurs que pour les squatteurs. Pourquoi ? Certes, aux yeux de la loi, le locataire mauvais payeur n’est pas un squatteur car, contrairement à lui, il est entré légalement dans le logement.
En revanche, à la fin du bail, le locataire ne possède plus de droit ni de titre. Et occupe donc illégalement le bien. C’est cette dérive que veut sanctionner la PPL. « Jusqu’ici la sanction, c’était l’expulsion (et le paiement de la dette). En faire un délit avec peine de prison est disproportionné », dénonce Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation abbé Pierre qui réclame la suppression des 6 mois de prison et des 7500 euros d’amende. « Ces peines ne concerneront qu’une infime minorité de cas de locataires de mauvaise foi qui se maintiennent illégalement dans un logement, en dépit d’une décision d’expulsion prononcée par le juge », répond l’entourage de Guillaume Kasbarian qui affirme que « cette loi ne changera rien pour l’immense majorité des locataires qui paient leur loyer et pour ceux qui ont un accident de parcours ponctuel. » Le Sénat examine actuellement la PPL du député de la majorité, avant que le texte revienne en seconde lecture à l’Assemblée nationale, a priori le mois prochain. À voir si ces peines seront maintenues si le texte est validé. Les débats n’ont pas fini de s’enflammer.